L’idée même de la ville devait disparaître.
François Ponchaud, Cambodge : année zéro
En avril 1975, les Khmers rouges vidaient presque entièrement Phnom Penh de sa population. Immeubles laissés à l’abandon, circulation interdite, écoles et espaces publics transformés en terres agricoles : pour instaurer une société égalitaire et rurale, le régime de terreur mené par Pol Pot prônaitla domination des paysans sur le « peuple nouveau » et des campagnes sur la ville jugée décadente.
Quarante ans plus tard, la série The Grand Opening of Phnom Penh explore le parallèle entre l’urbicide de la capitale cambodgienne – cette volonté de détruire et de nier toute culture urbaine – et les conséquences du développement économique actuel. Les réclames des promoteurs ont remplacé la propagande communiste. Les populations ne sont plus déplacées pour des raisons idéologiques mais sous la pression du marché immobilier. Aux foules horizontales condamnées aux travaux forcés dans les champs, les chantiers de la mondialisation ont substitué une occupation verticale du territoire. La ville se soustrait de nouveau au regard, désormais dissimulée derrière les filets d’échafaudages et la toile désordonnée du réseau électrique.
À l’heure où Phnom Penh peut enfin se projeter dans l’avenir des métropoles asiatiques, la disparition symbolique du paysage pose en creux la question de l’identité. Identité d’une ville à la morphologie incertaine, encore en instance d’advenir ; identité de l’individu confronté à une esthétique de la multitude et de la saturation du champ de vision.
Ce travail a été réalisé en résidence à l’Institut français du Cambodge.
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Co-lauréat du prix Maison Blanche au festival Photo Marseille 2016
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